Course à pied

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Récupération après une course du BU55 : Apaiser mes douleurs au genou

Par : Hugo Boivin, ostéopathe D.O.

Le Bromont Ultra 55 km (BU55) est une épreuve particulièrement exigeante, même si dans le cas de cette distance, les adeptes de très longues distances parlent de « court ultra ». Une course de cette distance peut mettre à rude épreuve l'ensemble des systèmes du corps, y compris le système musculo-squelettique, nerveux, digestif et circulatoire.

Après avoir accompli l'éprouvant BU55, j'ai ressenti des douleurs sur la face latérale du genou gauche, un endroit sensible qui subit une forte sollicitation, surtout lors des descentes. Voici comment on pourrait envisager de soulager ces symptômes et favoriser une récupération optimale.

Identifier la Cause des Douleurs

Les douleurs au genou, en particulier au niveau de l'articulation tibio-fibulaire supérieure, qu’on appelle tendinite du fascia-lata - également connue sous le nom de "syndrome de l'essuie-glace" - résulteraient souvent d'une surutilisation ds muscles et tendons de cette articulation. En trail running, les descentes exerceraient une pression intense sur les articulations en raison des impacts répétés, accentuée par le fait que lors de la pose du pied en descente, "on chute d'une plus grande hauteur". Cette sollicitation intense ajouterait une contrainte importante sur le tendon du tenseur du fascia-lata, ainsi que les fibres musculaires des quadriceps travaillant de manière excentrique. Ces contractions musculaires sont essentielles pour atténuer les forces, en réduisant la vitesse de descente du centre de gravité et en atténuant l'impact lors du contact du pied avec le sol.

D'autres facteurs, tels que des lacunes posturales ou une technique de course inadéquate, pourraient également contribuer à l'apparition de ces douleurs. La jambe d’attaque, c’est-à-dire celle que le coureur privilégie afin de monter ou descendre un obstacle, peut sur cette distance expliquer la surcharge mécanique. Également, un volume excessif d'entraînement en termes de distance parcourue ou de nombre de séances par semaine, un passage trop soudain à une surface de course différente, ou la course sur un terrain vallonné peuvent tous avoir des impacts négatifs.

Face à de telles douleurs au genou, l'ostéopathe commencerait par évaluer les structures adjacentes, notamment la hanche, le bassin et la cheville. Ensuite, en approfondissant son analyse, il examinerait les restrictions présentes dans les chaînes physiologiques, y compris les structures viscérales. À partir des éléments qu’il aura mis en évidence, l’ostéopathe élaborera son plan de traitement.



L'Approche Ostéopathique

Principes Fondamentaux de l'Ostéopathie :

L'ostéopathe suivra les principes fondamentaux de l’ostéopathie tels qu'énoncés par le fondateur de l’ostéopathie, Andrew T. Still, et il est pertinent de les rappeler ici :

Approche Ostéopathique pour les Limitations Tissulaires au Genou :

Dans le contexte d'une douleur au genou, l'ostéopathe commence par aborder les limitations tissulaires en relâchant les tensions qui affectent l'ensemble des chaînes physiologiques préalablement identifiées. Ces manœuvres visent à réduire le stress mécanique sur la zone douloureuse, notamment en rétablissant l'amplitude de mouvement des articulations du genou.

En conformité avec la "règle de l'artère" d'Andrew T. Still, l'ostéopathe se concentre ensuite sur les structures environnantes des voies artérielles, y compris les artères et les veines. L'objectif est de favoriser une circulation sanguine optimale pour permettre le transport de tous les éléments impliqués dans le processus inflammatoire. Ce processus commence par une cascade de réactions chimiques parfaitement orchestrées mettant en jeu de nombreuses protéines. La phase suivante est celle de la reconstruction tissulaire, impliquant notamment l'apport de nombreux éléments tels que des facteurs de croissance, du collagène et une grande quantité d'eau. Cela met en évidence l'importance d'une irrigation adéquate du site inflammatoire.

De même, il en est ainsi pour le retour veineux. Fonctionnant en parallèle avec la circulation artérielle, il est essentiel de maintenir une circulation fluide afin que les déchets métaboliques et les produits de l'inflammation retournent efficacement vers le système circulatoire pour être éliminés et recyclés. Cela contribue à réduire l'accumulation de toxines dans les tissus environnants.

En ce qui concerne la circulation nerveuse, l'ostéopathe prend en compte les nerfs qui innervent la région du genou. L'objectif est de garantir une communication optimale entre le système nerveux central et les structures du genou. Une communication nerveuse efficace est cruciale dans la réponse inflammatoire expliquée plus haut, mais aussi pour le contrôle musculaire et la perception de la douleur. Il s'agit ici de la coordination de l'homéostasie locale, conformément au principe ostéopathique de l'auto-régulation du corps. En assurant un flux nerveux adéquat, on favorise une réponse appropriée aux stress musculaires et tendineux, contribuant ainsi à l'accélération de la disparition de la douleur au genou.v vi

Évaluation de la Technique de Course

Outre le traitement local pour favoriser la guérison et réduire la douleur, l'ostéopathe peut effectuer une évaluation de la technique de course, si celui-ci est dûement formé (ce qui est mon cas). Corriger la posture et la technique de course à l'aide d'exercices simples et d'une prise de conscience pendant la course peut aider à répartir la charge mécanique de manière plus équilibrée. Il est courant, notamment sur des sentiers techniques, d'attaquer les obstacles toujours avec la même jambe, ce qui peut entraîner des déséquilibres.

En somme, la récupération après le BU55 nécessite une approche complète, couvrant à la fois les problèmes locaux au genou et les déséquilibres posturaux plus vastes. L'ostéopathe, grâce à ses compétences, peut jouer un rôle essentiel dans cette démarche, en contribuant à rétablir l'équilibre homéostatique du corps. Une récupération efficace garantit une meilleure performance à long terme. Grâce à une évaluation approfondie, une prise en charge ostéopathique soigneuse, et la possibilité de corriger la technique de course, il est possible de soulager la douleur, améliorer la récupération, et prévenir de futurs problèmes. Après une épreuve aussi exigeante que le BU55, le rétablissement complet est essentiel pour continuer à profiter de la course à pied et atteindre de nouveaux objectifs.



Bibliographie

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Bruchard, Arnaud. « Impact de la charge, de la décharge, de l’âge et des lésions sur le tendon ». Consulté le 20 octobre 2023. https://www.wmaker.net/kinesport/Impact-de-la-charge-de-la-decharge-de-l-age-et-des-lesions-sur-le-tendon_a4603.html.

Millet, Grégoire, et Pascal Balducci. « Les effets immédiats des courses d’ultra-endurance : état des lieux et conséquences pour la santé ». Mains Libres 217 (1 juin 2017): 9‑16.

Nebuloni, Elodie. « Syndrome de l’Essuie-glace et Ostéopathie | Oostéo ». Consulté le 19 octobre 2023. https://oosteo.com/blog/2021/03/syndrome-de-lessuie-glace-et-osteopathie/.

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Still, Andrew Taylor, et Carol Trowbridge. Philosophie de l’ostéopathie. Sully, 1999.