Ostéopathie

L’ostéopathie c’est quoi?

Par : Hugo Boivin, ostéopathe D.O.

"Je trouve en l'homme un univers en miniature. Je trouve la matière, le mouvement et l'esprit."
- Andrew T. Still, fondateur de l'ostéopathie (Still 1998, p.306)

"L'ostéopathie, c'est quoi ?" C'est une question qui intrigue de nombreuses personnes, mais la réponse à cette interrogation va bien au-delà d'une simple définition d’une thérapie manuelle. Pour comprendre ce qu'est l'ostéopathie, il est essentiel de plonger dans son histoire fascinante, de rencontrer son fondateur visionnaire, et d'explorer les principes fondamentaux qui sous-tendent cette discipline de soins holistique. Dans cet article, nous lèverons le voile sur l'origine de l'ostéopathie, les principes qui la guident, et comment elle a évolué au fil des années pour devenir une approche de soins complète.

Le fondateur

L'ostéopathie est inventée dans les années 1870 par un médecin américain du nom de Andrew Taylor Still. Il apprend la médecine auprès de son père, un pasteur méthodiste également médecin.

Lors de la guerre de Sécession, le docteur Still est marqué par son impuissance à soigner ses semblables. Aussi, il remarque que dans les villes qui n'avaient pas de médecin, les gens mouraient moins. Enfin, la perte de trois de ses enfants lors d'une épidémie de méningite amena cet homme à pousser sa réflexion afin de développer une méthode de soins axée sur le patient. Fervent croyant, le docteur Still disait : «Le corps de l’homme est la pharmacie de Dieu et comprend en lui-même tous les liquides, drogues, lubrifiants, opiacés, acides et antiacides, et toutes sortes de drogues que la sagesse de Dieu a pensé nécessaire au bonheur et à la santé humaine» (Still 1998, p.164).

Il élabore sa méthode en étudiant intensivement l'anatomie du corps humain en déterrant des cadavres amérindiens. Au début, il pratique de manière itinérante et passe souvent pour un excentrique. Mais tranquillement, il développe une renommée à travers tout le pays puisqu'il réussit à guérir de nombreuses maladies.

C'est en 1892 qu'il fonde la première école d'ostéopathie, à Kirksville dans le Missouri. Ses enfants et quelques amis sont ses premiers élèves. Rapidement, l'ostéopathie prend un essor fulgurant. En 1898, Andrew Taylor Still se retire de la pratique et de l'enseignement de l'ostéopathie pour écrire quatre volumes, dont son autobiographie, et qui deviendront les bases de l'ostéopathie. Il meurt en 1917 à l'âge avancé de 89 ans.

Les principes fondamentaux de l'ostéopathie

Le principe de la globalité :

Cette notion est omniprésente à travers l'ostéopathie bien qu'elle n'ait jamais été définie clairement par Andrew Taylor Still. Celui-ci exprimait ce concept à travers les mots «unité» ou «totalité», parfois «universalité». Cela signifie qu'un individu doit être considéré dans son intégralité, c'est-à-dire avec son passé, son présent, sa structure, ses émotions, son environnement social, ses activités et son métier.

Le principe de l’interrelation structure/fonction :

Les structures du corps et les fonctions qu'elles doivent remplir sont interdépendantes. Si une structure du corps humain commence à perdre de la mobilité, la fonction qu'elle est censée remplir est affectée, entraînant un trouble fonctionnel. Still recherchait et corrigeait les irrégularités dans les structures qui composent le corps, pour améliorer ses fonctions. Pour cela, il utilisait les os, facilement accessibles sous la peau et servant de points d'attaches aux muscles et aux organes. D'où le terme ostéopathie.

Le principe du mouvement ou la loi de l'artère :

L'artère est absolue. Tant que les tissus du corps sont libres, tant que la biomécanique des articulations et les mouvements de glissement entre les organes du corps sont libres; tant que chaque partie du corps peut bouger de manière impeccable, alors la circulation sanguine, la circulation lymphatique et les informations nerveuses peuvent faire leur travail et favoriser l'homéostasie du corps humain.

Le principe de l’autoguérison :

Si nos cellules reçoivent tous les éléments dont elles ont besoin pour bien fonctionner, les processus d'autorégulation du corps vont fonctionner à leur plein potentiel. Cela peut se faire non seulement grâce à une liberté de mouvement de toutes les parties du corps, mais aussi grâce à une bonne hygiène de vie.

L'ostéopathie, d'hier à aujourd'hui

Depuis sa création, l'ostéopathie a beaucoup évolué. Plusieurs praticiens, anciens élèves de Still ont ajouté leur grain de sel, sans toutefois avoir reçu l'approbation du fondateur. Ces approches, respectant les principes fondamentaux se sont au gré du temps ajoutées aux enseignements d'Andrew Taylor Still et elles font maintenant l’unanimité parmi la communauté des ostéopathes.

Approche structurelle ou articulaire :

Cette approche s'intéresse aux articulations. Les os et les muscles sont les structures sur lesquelles les techniques sont appliquées. Le but est de donner le maximum d'amplitude de mouvements aux articulations. Ainsi, non seulement la fonction de mobilité musculo-squelettique est optimale, mais la circulation sanguine et nerveuse l'est aussi, puisque les os et les muscles sont le passage des artères, des veines et des nerfs.

Approche fonctionnelle ou fasciale :

Cette approche s'intéresse aux fascias, aux ligaments et à tous les tissus de soutien du corps humain. Les fascias constituent une seule et unique grande toile qui entoure toutes les structures du corps. Cette toile entoure les articulations, les muscles et les os. Elle englobe les organes et permet le glissement entre eux. Elle s’immisce jusqu'aux plus infimes parties du corps. Chaque artère, veine et nerf est entouré de fascia. Même la plus petite unité vivante du corps humain, la cellule, est soutenue par les fascias. Ces fascias sont faits de tissus conjonctifs et leur fonction est de répondre aux stress mécaniques. Ils se transforment en s'épaississant aux gré des chocs, des chutes et des mouvements répétés. Ils permettent aux structures de glisser les unes sur les autres. Parfois, les feuillets de tissus adhèrent ensemble et perdent leur capacité de glissement. Les techniques fasciales ont pour but de « briser » ces adhérences et de redonner toute l'amplitude afin que la circulation sanguine, lymphatique et nerveuse se fasse de manière optimale.

Approche viscérale :

Cette approche s'intéresse aux organes du corps humain. Le but est de mobiliser ceux-ci en agissant en projection, afin de détendre les tissus qui les entourent. Il est important de mentionner qu'il ne s'agit pas de soigner les pathologies qui peuvent se présenter. Dans ce cas, les patients seront référés en médecine conventionnelle. Il s'agit encore une fois de permettre une bonne irrigation sanguine, lymphatique et nerveuse pour permettre l'homéostasie du corps humain.

Approche crânienne :

Cette approche s'intéresse aux structures osseuses et fibreuses de l'ensemble crânio-sacré. Cela inclut les os du crâne, qui sont articulés entre eux grâce aux sutures, ainsi que les membranes qui séparent les différentes parties du cerveau. Ces membranes entourent les plexus nerveux et veineux dans le crâne et dans la colonne vertébrale, par le canal médullaire avec ses méninges et cela jusqu'au sacrum-coccyx qui constitue l'extrémité inférieur de ce système.

Conclusion :

L'ostéopathie, née de la vision et de l'ingéniosité du Dr. Andrew Taylor Still, est bien plus qu'une simple approche de thérapie manuelle. C'est une philosophie de soins de santé qui embrasse la globalité de l'individu, reconnaissant l'interconnexion entre le corps, l'esprit et l'âme. Les principes de l'ostéopathie, tels que la globalité, l'interrelation structure/fonction, le mouvement, et l'autoguérison, incarnent une approche holistique visant à restaurer et à maintenir l'équilibre et la santé. Alors que l'ostéopathie a évolué au fil des décennies, de nouvelles approches, telles que l'ostéopathie structurelle, fonctionnelle, viscérale et crânienne, se sont développées pour répondre aux besoins individuels des patients. En fin de compte, l'ostéopathie est une invitation à considérer l'être humain dans sa totalité, unifiant la matière, le mouvement et l'esprit pour favoriser la guérison et le bien-être.

Bibliographie :

AOMTL. « Devenir Ostéopathe : les principes fondamentaux | AOMTL ». Académie d’ostéopathie de Montréal, 2010. https://www.aomtl.ca/losteopathie-au-quebec.

Bouchez, Jérémy. « Et vous ? Comment se portent vos fascias ? » Hinnovic (blog), 25 mars 2018. https://www.hinnovic.org/post/et-vous-comment-se-portent-vos-fascias.

Eckert, Marie. Le concept de globalité en ostéopathie. De Boeck Superieur, 2013.

EROP, European Registrer for Osteopathic Physicians. « Dysfonctions somatiques | EROP ». Déclaration des Médecins Ostéopathes Européens (blog), 2019. http://www.erop.org/fr/declaration-for-osteopathy/somatic-dysfunction/.

ROF. « Définition et concept - Registre Des Ostéopathes de France ROF - Association ostéopathie », 2012. https://www.osteopathie.org/88-decouvrez-l-osteopathie-definition-et-concept.html.

Still, Andrew Taylor. Autobiographie. Sully éd., 1998.